En bonne hédoniste, Natalya cherche à se faire plaisir et à vivre heureuse de toutes les manières possibles ou presque. Que ce soit par le sexe, au travers de la nourriture, en se querellant ou encore en explorant le monde, tout ce qui sort de l'ordinaire est bon à prendre. Car s'il y a bien quelque chose que la jeune femme déteste, c'est la monotonie : toujours croiser les mêmes visages, arpenter les mêmes rues, tomber dans la routine, être abrutie par le train-train de la société et ses contraintes… Une horreur sans nom aux yeux de la lunettée. Sans dire qu'elle rêve d'aventures, il est certain que Natalya a du mal à rester en place. Elle ne s'endort ni ne se réveille jamais à la même heure, arpentant les bars jusqu'à ce qu'elle tombe de sommeil, ou dans les bras de charmante compagnie.

Et pour lui permettre toutes ces fantaisies dont-elle tend à profiter un maximum, il faut quelque chose d'essentiel à la jeune femme : de l'or.

Vénale, elle ne bougera bien souvent son derrière que pour gagner sa croûte. Et si elle n'hésite pas à délester de temps à autres les passants de leur bourse, c'est une activité à laquelle elle ne se risque presque plus depuis quelques années. A la place, elle aura préféré le mercenariat : plus fatiguant mais comme en compensation elle peut se battre et se défendre, c'est aussi quelque part un peu plus « sûr ». Dans les deux cas, elle ne peut échapper aux risques du métier : autant en choisir un qui peut la rendre plus forte dans ce cas, non ? Surtout qu'à force, la belle s'est rendu compte qu'elle pouvait prendre plaisir à se battre. Peut-être par masochisme – ça n'aurait rien d'étonnant en tout cas – prendre des coups ne la dérange guère, tant qu'on ne parle pas de cinglantes coupures ou de graves blessures bien entendu. Ces dernières, c'est elle qui préfère les infliger.

De basse extraction, Natalya compense son manque de culture et de connaissance par le miel de sa langue. La jeune femme ment bien, et souvent avec ça, et n'hésite pas à tromper les autres si cela peut lui apporter un quelconque bénéfice, s'arrangeant toujours pour ne pas en payer les frais : soit en utilisant sa ruse et sa fourberie, soit en prenant ses jambes à son cou. En un sens, on pourrait aussi qualifier cette bonne vivante de farceuse, cette dernière adorant taquiner ses rares amis de ses blagues et petites surprises. Toute occasion est bonne pour rire ou sourire. Elle peut être plutôt bavarde aussi une fois qu'elle est lancée

Elle n'est cependant pas vraiment une mauvaise personne, elle pourrait aider un enfant dans le besoin au bord de la route. Mais ce n'est pas une sainte non plus. Elle n'est pas sans morale, mais disons qu'elle a son propre code conduite et qu'elle le suit uniquement quand ça l'arrange, en fonction de ses humeurs et de la personne qui lui fait face. Elle fonctionne d'une manière bien plus complexe qu'elle ne le montre aux autres, se servant parfois de son attitude comme un masque pour ses vraies émotions.

Des envies cachées et plus profondes, des objectifs à long terme, elle en a probablement d'autres que ceux qu'elle montre tous les jours, et ne les confiera probablement pas facilement. Et avoir sa confiance est quelque chose d'aussi difficile que rare...

S'il y a bien une insulte qui n'affecte pas Natalya, c'est celle pourtant communément répandue de « fille de pute », car dans son cas, ce n'est que la plus stricte des vérités et elle se moque complètement de ce que les gens peuvent penser de ça.

Natalya à donc vu le jour un matin d'hiver 2697 à Viralys, dans un des rares lits propres de l'établissement où sa mère effectuait le plus vieux métier du monde. Fille d'un père anonyme, c'est dans ce drôle d'environnement pour une enfant qu'à grandit la rousse, loin des préjugés de la société et de ses codes moraux discutables, lui permettant une ouverture d'esprit probablement plus grande que la moyenne. Comme le dit l'adage, il ne faut jamais juger un livre à sa couverture.

On ne peut pas dire qu'elle ait vécu le plus sainement du monde, ayant probablement appris beaucoup trop tôt ce à quoi référaient certaines expressions graveleuses, et ayant vu de nombreuses femmes, dont sa mère, se faire peloter par des clients en salle, mais elle mangeait à sa faim et avait comme camarades de jeu les enfants d'autres gagneuses. Néanmoins, ce n'était pas sans contreparties : dès qu'elle fut en âge, à elle les corvées de cuisine et de ménage : la paille sur laquelle elle dormait et la soupe qu'elle ingurgitait, elle devait la mériter. Et si elle n'en était pas capable, elle n'aurait qu'à se manger les mains et dormir dehors.

Grandissant, Natalya aurait probablement été destinée à effectuer le même métier que sa génitrice qui ne l'avait pas plus aimée que ça si cette dernière n'avait pas fini par mourir de maladie, et que trop turbulente et faute de protectrice, la gamine n'avait été mise à la porte de l'établissement où elle avait passé le plus clair de ses jours.

Du haut de ses douze ans, c'est donc une gamine qui n'avait pas sa langue dans sa poche et au caractère de cochon qui se retrouva à mendier et dormir dans la rue. Le tout étant loin d'être suffisant pour assurer la pérennité de son existence, Natalya choisi parmi toutes les options qui lui étaient possibles de voler pour survivre, et d'aller se faufiler la nuit dans les écuries pour dormir au chaud et dans une relative sécurité. Et pendant les quatre années qui suivirent, c'est plus ou moins ainsi que vécu l'adolescente : avec des hauts et des bas, à devoir parfois se planquer quelques jours et faire profil bas, et ainsi de suite.

Mais à l'aube de ses dix-sept ans, la chance de la jeune voleuse finie par tourner. Voulant subtiliser une bourse à la mauvaise personne dans une taverne bondée, Natalya se fit attraper avant même d'avoir pu toucher le cuir contenant les précieuses piécettes. Ayant peur pour la première fois de sa vie, l'homme à la mine patibulaire auquel elle s'en était pris se saisit bien rapidement d'elle. Au lieu de la battre, de lui couper les mains comme dans certaines cultures, ou encore de la violer en guise de « punition », le gaillard, qui semblait aimer la cruauté et la violence, approcha sa prise de sa cheminée.

Là, il la força à garder les yeux ouverts, et lui approcha lentement le visage des flammes : assez loin pour que sa chevelure ou autre ne prenne pas feu, mais suffisamment pour que la chaleur du foyer lui brûle la rétine et ne la fasse atrocement souffrir. Renvoyée à moitié aveugle et encore hurlante de douleur dans la rue, Natalya erra le reste de la nuit en quête d'un refuge, non sans mal. Les maigres économies qu'elle avait, elle les dépensa dans des lunettes pour corriger ce problème de vue, bien que voyant a présent tout avec un filtre légèrement jaunâtre, probablement à vie. Dès lors, ces lunettes devinrent pour elle un rappel permanent de l'inconscience dont-elle avait fait preuve, et elle se jura qu'à moins d'extrême nécessité, on ne la reprendrait plus à fourrer ses mains dans les poches des autres.

De plus, cette expérience lui avait fait comprendre à quel point elle était vulnérable. Or, elle refusait de pouvoir se retrouver dans une situation similaire un jour.

C'est ainsi que la jeune adulte s'employa à rejoindre une compagnie de mercenaire du coin. D'abord refusée au vu de son manque de compétences, elle usa de sa langue de plus d'une manière pour convaincre qu'elle serait tout à fait capable avec un peu d'entraînement, et qu'elle apprendrait vite les rudiments du métier. C'est ainsi qu'elle fut initiée au maniement des armes et qu'elle commença à participer aux premiers contrats de sa vie. Pas folle, elle avait toujours fait en sorte de s'embarquer pour des missions avec de faibles risques, même si ça ne l'avait pas empêché d'y échapper belle à plusieurs reprises…

Des années plus tard, Natalya est à présent une mercenaire freelance. On ne peut pas dire que cette dernière jouisse d'une grande réputation ou d'un compte en banque fourni, mais c'est plus que suffisant pour lui permettre de profiter de la vie.

Néanmoins, elle semble de plus en plus avoir envie de bouger, de changement. La jeune femme souhaite plus, commencer à prendre des risques. Elle veut être retenue pour autre chose qu'une simple mercenaire vivant dans une ville pourrie jusqu'à la moelle.

Il était peut-être temps pour elle de commencer à se forger une nouvelle vie.